mardi 21 janvier 2014
















 

Alexandre Galand 
"Field recording : l'usage sonore du monde en 100 albums"
Collection Formes
Éditions Le Mot et le Reste, 2012.

Mais qu'est-ce donc cet anglicisme de plus se dit le novice quand il se retrouve devant ce terme au détour d'une chronique de disque. L'usage voudrait qu'on utilise le terme français "enregistrement de terrain" sans apporter plus de réponses aux questionnements de notre quidam précédent.
Quelques éclaircissements s'imposent en préalable et qui mieux que l'auteur du livre en question pourrait en parler : "Tout au long du vingtième siècle, des hommes ont parcouru le monde afin de capter des curiosités sonores pour des raisons scientifiques, patrimoniales et esthétiques. Ce sont des audio-naturalistes, des collecteurs de musique traditionnelle, mais aussi des compositeurs avides de découvrir un nouveau matériau musical. Les microphones sont leurs outils, voire leurs instruments, l'écoute est leur méthode d'approche." Les bases de la structure du livre sont posées, les deux grandes parties (une de présentation théorique contenant trois entretiens et une autre avec les fameuses 100 chroniques) seront séparées en trois chapitres recouvrant les trois orientations du travail d'enregistrement de terrain : "Capter les sons de la nature" - "Capter les musiques des hommes" - "Composer". L'auteur, docteur en Histoire, Art et Archéologie, arrive à capter l'attention, à faire aimer son sujet d'étude, tout en le replaçant, délicatement, dans le contexte des grands chambardements musicaux et scientifiques du vingtième siècle, avec la naissance de l’ornithologie, l'ethnomusicologie et la musique concrète. Le "field recording" est le fils naturel des révolutions technologiques et théoriques, comme si Pierre Schaeffer jonglait avec des Nagra. Bel exemple de vulgarisation scientifique, tout en gardant la rigueur en bandoulière, ce livre est un enchantement par le réservoir de découvertes qu'il procure, on saute de sons de grenouille américaine à un disque réalisé à partir des (micro)vibrations d'immeuble, tout en passant par les jeux de gorges des inuits, les brames des cerfs ou le chant de lacs gelés (réalisé avec des hydrophones). Plusieurs grands noms de la musique expérimentale sont là : Luc Ferrari, Steve Reich, Henri Pousseur, Alvin Lucier, Bernard Fort, Pierre Henry, Charlemagne Palestine aux cotés de plus jeunes mais pas moins talentueux : Lionel Marchetti, Francisco Lopez, Eric Cordier, Michael Gendreau, Bj Nilsen... Le champ des possibles est quasiment illimité, tant le monde qui nous entoure est source de sons, donc de musique selon les intuitions de John Cage et de la musique concrète !
Avec ce livre, au demeurant très bien écris chose assez rare pour être souligné, Alexandre Galand signe une très belle porte d'entrée à un genre méconnu mais qui devrait intéresser toutes les oreilles en quête d'horizons nouveaux et aventureux et en même temps ceux fascinés par le son sous toutes ses formes et que la radio (je pense, entre autres, à certaines émissions de Radio France comme les Nuits Magnétiques ou l'Atelier de Création Radiophonique) nous a déjà habitué à "montrer" d'une belle manière.

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